здрасвствуйте*

Lorsqu’on évoque Moscou, on ne peut pas s’empêcher de penser à cette époque, pas si lointaine finalement, où la Russie faisait partie de l’Union Soviétique et où le monde occidental était en guerre, froide, avec le communisme étatisé.

A grands renforts de films, de publicités et d’articles divers, on nous dépeignait un monde froid, austère, déshumanisé, quelque part entre crainte, immensité et secret. C’est qu’autant que je me souvienne, nous avions aussi notre propagande occidentale et elle a eu ses effets sur mon jugement vis à vis de ce pays…

Et ça n’a donc jamais été une destination pour laquelle j’ai eu la moindre attirance ! Je l’avoue sans honte puisque j’étais encore enfant quand le mur de Berlin est tombé et l’URSS avec. Je préférais à l’époque largement Rocky Balboa à Ivan Drago

Alors, quand l’occasion s’est présentée de me rendre dans la capitale russe, je n’étais pas franchement emballé. Bien que ce fusse à un âge dit adulte et que la перестройка et la гласность aient fait long feu et donné place à un capitalisme effréné, j’avais l’image d’un pays fermé, dangereux et pas franchement accueillant pour le petit touriste occidental que je suis.

Mais comme on dit : quand on aime, on ne compte pas… A moins que l’expression ne soit finalement « qu’on ne conte pas », qu’on ne se raconte pas d’histoire ! J’ai donc finalement suivi ma compagne et nous avons rejoint son frère, qui habite Moscou, pour que je me fasse une idée par moi-même, puisqu’on y était invité.

Et honnêtement, les images d’Epinal que l’on se crée ne sont pas toujours dénuées de véracité…

Le visa

En Russie, pour montrer patte blanche, il faut y avoir été invité, littéralement ! L’obtention du visa est concomitante à la production d’une invitation en bonne et due forme d’un ressortissant russe (qui, j’imagine, ne doit pas être poursuivi pour diverses peines de type trahison, fomentation de déstabilisation politique, etc, etc…). C’est là que ça se corse : mon beau-frère a beau vivre en Russie, il ne peut pas nous inviter puisqu’il est français, quand bien même nous allions chez lui. Heureusement, une agence de voyage dévouée nous a proposé une formule tout compris incluant le visa et l’invitation factice. Car oui, mon hôte était sur le papier un hôtel dans lequel je ne suis jamais allé. Etrange.

Ensuite, pour un séjour d’une semaine minimum, il faut normalement aller se faire enregistrer au poste de police du coin. Renseignements pris sur place auprès de mon (vrai) hôte : « si tu as envie de perdre une journée complète pour ça… » Nous n’irons donc pas à la police. Mais cela rajoute au sentiment que quoique l’on fasse dans ce pays, mieux vaut aller dans le bon sens.

Far east
Situé à une quarantaine de kilomètres du centre de Moscou, l’aéroport international Domodedovo est situé au milieu de nulle
part, comme à peu près toute destination en dehors des centres urbains et notamment de la plus grande ville d’Europe qu’est Moscou. On a préféré se rendre au centre grâce à mon beau-frère, ce qui nous a évité la traditionnelle quête du taxi officiel et les négociations dans une langue que nous ne maitrisions pas du tout. Car même si l’anglais est pratiqué, la langue de Shakespeare a été longtemps la langue de l’ennemi… Cela dit, des transports en commun existent pour rejoindre le centre.

Le trajet (de nuit) donne le La : une six-voies énorme, en ligne droite sur des dizaines de kilomètres, éclairée de temps en temps, avec des autos et des camions de tous âges, dont certains garés à même le bas côté, et, comble urbanistique pour ce qui s’apparente à une autoroute, des feux de signalisation disséminés ça et là qui permettent… aux piétons de traverser. C’était comme si on avait parcouru un no-man’s-land, quand soudain, le gigantisme de la ville nous apparait ! Il nous a fallu plus d’une heure pour rejoindre notre adresse dans le centre de Moscou. Ma première impression sera que la capitale russe a été conçue comme un miroir des grandes villes américaines, l’histoire en plus. L’impression se confirmera les jours suivants.

Si loin, si proche

Grâce à Béno (le frère de ma compagne, donc), nous avons pu nous immerger dans le quotidien d’un expatrié en Russie, plutôt que comme de simples touristes. En effet, nous avons essayé de vivre à l’heure russe, en prenant les taxis (très bon marché), le métro (qui est en soit un monument à visiter) et en faisant nos courses dans les supérettes de quartier. Ces « пpодукты » (intraduisibles !) sont souvent tenues par des babouchka (grand-mère russe) ou des tatares (plutôt Ouzbeks ou Azeris). Ils sont ouvert tard, proposent à peu près tout ce qui permet de passer un typique séjour moscovite : bière Tri Medvedya et vodka Russky Standart, boite d’énormes cornichons aigres-doux, fromage fumé en lanière tressé, conserve de poissons à l’huile… J’avoue que pour un Français aimant la bonne chère, la vue d’un réfrigérateur russe ne met pas en appétit. Mais passons ce poncif culinaire franchouillard : manger à la russe est très économique ! Et nous n’avons pas boudé notre plaisir de manger de temps en temps dans des restaurants classiques, voire typiques, bien que… Géorgiens, et dont la gastronomie n’a d’égale que la difficulté de prononcer leurs patronymes : complexe mais tellement dépaysante.
Outre la gastronomie, c’est la dimension patrimoniale qui ajoute à l’austérité culinaire : l’aspect assez monolithique de l’architecture moscovite. Il y a bien quelques bâtiments de grande qualité architecturale, hérité du fond des âges russes, mais la ville ayant été détruite et reconstruite de nombreuses fois, notamment par les russes eux-mêmes en septembre 1812, et ayant subi la purge culturelle soviétique, elle nous est apparue bien plus dépaysante par ce contraste avec les grandes capitales européennes, que nous ne l’aurions imaginé. Même Saint-Pétersbourg, considérée comme un joyau d’architecture, nous a semblé bien fade malgré son apparât.

Ainsi on peut croiser diverses époques et influences politiques : le Kremlin, mariant architecture moyenâgeuse, de style renaissance ou soviétique, les tours staliniennes dénommées les Sept

Soeurs, les musées Pouchkine, Polytechnique, le théâtre Bolchoï, etc… tout concourt à donner à la ville son aura, entre histoire et propagande. Et en mettre plein la vue. Car tout appelle à la grandeur : les artères que l’on appellerait boulevards en France sont de simples… rues là-bas ! Prenez le boulevard Novinskiy par exemple : on y décompte 10 voies par endroit… Et le dernier périphérique de la ville, celui qui ceinture l’agglomération de Moscou avant la campagne fait plus de 100 km de long…

Voir ou regarder, telle est la question

Qui dit Moscou dit Bolchoï. Etymologiquement, cela veut dire « grand ». Donc le Théâtre Bolchoi est tout simplement le Grand Théâtre. Nous avons eu la chance d’aller voir un ballet, pas dans le théâtre principal mais dans une de ses annexes, tout aussi majestueuse. C’est une expérience à vivre quand on aime un tant soit peu la danse. Je n’en suis pas un grand amateur, et probablement que la pièce n’était pas de tout premier ordre, mais cette expérience permet de s’imprégner du goût des moscovites pour les belles choses. Il fallait voir les toilettes des dames. C’était pourtant un soir de semaine et malgré cela tout le monde était endimanché. L’entracte a été l’occasion de prendre une coupe de champagne (comble du luxe il y a 30 ans !) dans une magnifique salon art-déco. Si l’envie vous prend, lors d’un séjour à Moscou, de voir un ballet au Bolchoi, prévoyez de prendre les places très longtemps à l’avance. Et n’hésitez pas à casser la tirelire si vous voulez être bien placés…

Comme je le disais plus haut, le métro est un monument en tant que tel. Les rames sont petit à petit remises à neuf mais reste encore de vieilles indications en cyrillique de l’époque soviétique.
Mais c’est surtout le décor qu’il ne faut pas louper. Construit à partir de 1935, ce serait Staline qui décida d’en faire un lieu de
beauté à l’usage de tous les camarades : peintures, bas reliefs, sculptures, stucs, lustres, on n’imagine pas à plus de 100 mètres de profondeur autant de richesse. Ça change de l’austérité et de la froideur de pas mal de bâtiments à l’extérieur.

On pourra également visiter le parc Gorki, s’y prélasser ou s’y baigner et également… y jouer aux boules ! Deux jeunes entrepreneurs y ont créé une petite guinguette où l’on peut s’adonner au sport provençal par excellence, la pétanque. Il s’appelle d’ailleurs la Boule, en français dans le texte.

Outre les différents bars parsemant le centre-ville, plus ou moins branchés, il faut se balader sur Arbat, l’artère commerçante et piétonne (!) de Moscou et s’amuser notamment à déchiffrer l’alphabet cyrillique de certaines enseignes. D’ailleurs, que veut dire à votre avis Мак Дональдс ? Un indice, cet établissement clownesque n’existait pas en Russie avant 1989 et dès son ouverture, il a connu un certain succès… Sur la place Rouge, qu’on ne présente plus, on peut aller flâner au GUM, havre de paix capitaliste (!).


Je terminerai pas une suggestion. Si l’atmosphère ssez froide et presque sécuritaire de la ville vous oppresse, je vous enjoins à passer une nuit ou deux dans une datcha. Après une cinquantaine de kilomètres, la ville fait place à des forêts immenses et, par ci par là, apparaissent de vieilles maisons de bois, les datchas, résidence russe par excellence. Très modestes pour la plupart, elles sont un lieu de villégiature de toutes les classes sociales russes. Je n’ai malheureusement pas pu le faire mais ce sera peut-être l’occasion lors d’un prochain séjour.

Eh oui, les images mentales que notre culture nous a inculqué à propos de la Russie étaient assez proches de la réalité mais cela reste à mon avis une destination dépaysante et presque attachante, pour peu que l’on daigne accepter une invitation.

До свидания!**

* Bonjour
** Au revoir !

Vous pouvez voir quelques images de Moscou sur cette page.

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